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16 juillet 2020

Au coeur de la crise - Interview de Camille, TLM Hôpital Bichât, AP-HP

Dans le cadre de la sortie notre magazine, le TechLabo.com, nous avons interviewé plusieurs TLM impliqués dans la crise COVID-19.

Interview de Camille BOI, TLM dans le département de Génétique du CHU Bichat.

Comment s’est mise en place l’aide apportée par le service de Génétique au service de Virologie ?

L’éventualité d’aller en renfort en Virologie a été rapidement évoquée au début de la propagation du virus. Mais l’éventualité qu’ils aient besoin de nous restait tout de même très minime à l’époque. Le mercredi 18 Mars, 2ème jour de confinement, ce besoin de renfort s’est amplifié. Nous sommes allés avec plusieurs technicien(ne)s de Génétique visiter le laboratoire de Virologie pour nous faire une idée de l’environnement et du travail à fournir là-bas. Une liste de volontaires a dès lors été mise en place. Nous pensions que cela prendrait du temps, mais le jour même il nous a été annoncé que deux technicien(ne)s devaient partir dès le lendemain, puis deux autres le lundi 30 Mars. Jordan et moi y sommes allés dès le lendemain et Myriam et Sylvie le lundi 30 Mars.

Quelles ont été vos motivations ?

J’ai eu besoin de me sentir « utile », au cœur de l’action. Il était très difficile pour moi de continuer à travailler comme d’habitude connaissant l’effervescence omniprésente autour de nous. Cependant, lorsque j’ai compris que je devais partir en renfort du jour au lendemain, le stress a pris le dessus sur la motivation. Mais pas le choix, l’engagement c’est l’engagement !

Comment s’est déroulée la formation en Viro ? Y-a-t-il eu des difficultés particulières ?

La formation a été très accélérée. En effet, il a fallu que nous soyons très rapidement autonomes afin de soulager les équipes déjà dans le vif du sujet depuis un bon moment. L’entrée au L3 fut immédiate, ainsi que les manipulations d’écouvillons nasaux (extraction et PCR). J’ai eu, au début, beaucoup de difficultés à gérer mon stress. L’environnement du L3 ainsi que l’organisation intense étaient très anxiogènes au départ, le temps de prendre ses marques.

Comment ont été organisés les plannings ?

Les plannings ont été établis d’une semaine sur l’autre avec parfois des modifications du jour au lendemain. Un(e) des technicien(ne)s venait tôt le matin et un(e) autre plus tard afin d’élargir les plages horaires. Puis nous avons arrêté d’y aller en semaine et très vite nous avons fait des gardes jusqu’à minuit, en binôme avec un biologiste. Les lendemains nous étions en réserve c’est-à-dire en repos mais disponibles en cas de besoin.

Y’a-t-il eu des difficultés particulières au niveau des contraintes horaires, des transports, vie personnelle ?

Pas de difficulté particulière mise à part l‘adaptation aux plages horaires beaucoup plus importantes qu’en Génétique.

Comment s’est passée l’intégration au sein de l’équipe de Virologie avec les technicien(ne)s et comment ont été les liens avec la « hiérarchie » ?

L’intégration s’est très bien passée. Tout le monde a été très accueillant, rassurant et disponible.

Avez-vous eu peur pour vous ou vos proches ?

Je n’ai pas eu peur car l’équipement de protection était très efficace. De plus, je prenais les précautions d’hygiène nécessaires en rentrant chez moi.

Vous êtes-vous sentie au cœur du soin ?

Je ne me suis pas sentie au cœur du soin car pas de contact direct avec des patients. Cependant je me suis sentie utile au bon déroulement des soins. Un petit maillon de la chaîne !

Vous êtes-vous senti soutenue par l’encadrement voire par l’Hôpital ?

Soutenue par mon encadrement direct oui. En revanche, au niveau de l’hôpital beaucoup moins. Il y a eu beaucoup de soutien envers les soignants (infirmières, aide soignants, etc).

Y’a-t-il eu des petits gestes de réconfort ?

Oui beaucoup ! Beaucoup de chocolat, des produits cosmétiques et des repas.

Y’a-t-il eu une reconnaissance financière particulière ?

Les heures supplémentaires payées et majorées à 50%.

Que vous a apporté cette expérience, au niveau personnel, professionnel ? Et à l’échelle des laboratoires ?

Ce fut très enrichissant de sortir de ma zone de confort et d’échanger avec de nouvelles personnes. J’ai beaucoup apprécié de découvrir une nouvelle discipline, un nouvel environnement et une autre organisation. J’ai trouvé incroyable la différence qu’il peut y avoir d’une discipline à l’autre dans les laboratoires. J’ai eu l’impression d’apprendre un nouveau métier.

Que pensez-vous de la reconnaissance professionnelle des TLM au niveau du public, de la direction hospitalière ?

Je trouve qu’il y a eu très peu de reconnaissance que ce soit du public ou de la direction hospitalière. Il a fallu faire de multiples rappels pour que le métier de technicien soit évoqué à la va vite. Moralement, ça a été un peu compliqué puisque nous nous sommes impliqués et on a participé à cette épidémie tout comme les soignants… Sans les TLM aucun prélèvement n’aurait été analysé et donc aucun résultat n’aurait été rendu. Il y a eu un « flou » sur notre statut de soignant ou de non soignant. La profession semble « entre deux », peu connue du public car pas assez valorisée par la direction hospitalière et les médias.

Y’aura-t-il un avant et un après Covid pour vous personnellement et pour la profession ?

Pour la profession je ne crois pas, car le rôle des TLM n’a pas été expliqué et valorisé au grand jour. Et personnellement, je pense que j’aurai un peu plus confiance en mes capacités d’adaptation et de gestion du stress.